« Non à l’insécurité ! Non au kidnapping ! Non à la légalisation, par la complicité, de l’activité des gangs armés ! Non à tout projet d’anéantissement de l’État visant à faciliter un quelconque agenda à l’encontre de ce peuple à qui cette terre est léguée ! »
En Haïti, dans la capitale Port-au-Prince, l’école Saint-Louis de Gonzague a été transformée en refuge. Séparés temporairement de leurs parents, plus de 300 enfants haïtiens tentent de fuir la violence des gangs en s’y réfugiant.
Il y a près de deux semaines, la commune de Cité Soleil où ces jeunes vivaient, dans la banlieue de Port-au-Prince, s’est transformée en champ de bataille entre bandes rivales. Plus de 471 personnes ont été tuées, blessées ou portées disparues entre le 8 et le 17 juillet, selon le dernier décompte de l’ONU. Et beaucoup ont dû fuir.
« Ils sont traumatisés, mais s’ils commencent à faire une partie de football, ils redeviennent des enfants », explique à l’AFP sœur Paesie, directrice de l’organisation Kizoto, responsable de leur hébergement dans cette école tenue par des frères catholiques. « Mais quand on commence à parler avec eux, on réalise qu’ils ont vu des choses horribles », poursuit la religieuse française, qui vit en Haïti depuis 23 ans. Elle affirme que la plupart d’entre eux ont perdu leurs maisons, brûlées par des membres des gangs.
Dieula Dubrévil, sans nouvelle de son conjoint, est réfugiée dans cette école avec ses quatre enfants. Elle raconte :
« Des balles ont atterri à l’intérieur de ma maison. Mon mari est sorti, ils l’ont battu. Ils l’ont martyrisé et blessé à la tête. »
L’Église d’Haïti a partagé sa préoccupation croissante de « la dégradation générale » de la situation en Haïti. Le 27 juillet dernier, prise entre les feux des gangs rivaux, la cathédrale de Port-au-Prince a été victime d’un « incendie d’origine criminelle ».
Dans leur communiqué, les évêques lancent à nouveau l’alerte.
« Nous avons tant de fois élevé nos voix pour interpeller chacun et chacune des fils et des filles de la patrie commune, afin de les alerter et sensibiliser sur les enjeux majeurs de l’heure. La peur a, par ailleurs, plongé les uns dans une profonde léthargie, tandis que les autres ne cessent de se rendre complices des malheurs de notre peuple : corruption, extrême pauvreté, insécurité généralisée, kidnapping, la méfiance interpersonnelle sont les maux auxquels est venue s’ajouter la violence systémique des gangs armés qui se déclarent la guerre ici et là. »
Ils finissent par se demander si cette criminalité profite à « des personnes intouchables ».
« Ils kidnappent, séquestrent, cassent, tuent, brûlent, et mettent ainsi en défi les pouvoirs établis qui semblent totalement dépassés par ce qui se passe. Pourquoi l’État n’agit-il pas pour sévir avec la rigueur nécessaire dans le cadre de la justice pour mettre les bandits hors d’état de nuire ? Est-il impossible de couper les sources qui fournissent aux groupes et aux individus les armes et les munitions, ou bien cela profite-t-il à des personnes intouchables ? »
« Il est déjà venu le temps de nous réveiller de notre torpeur, pour dire de toutes nos forces : Non à l’insécurité ! Non au kidnapping ! Non à la légalisation, par la complicité, de l’activité des gangs armés ! Non à tout projet d’anéantissement de l’État visant à faciliter un quelconque agenda à l’encontre de ce peuple à qui cette terre est léguée ! », affirment les évêques.
Ils sollicitent également « l’intervention toute-puissante de Dieu » et appellent « tous les fidèles à une prière incessante et confiante au Seigneur pour la libération d’Haïti ».
M.C. (Avec AFP)